Comprendre la contention
Restreindre les mouvements de l’enfant dans le but de lui procurer des soins semble assez fréquent dans la pratique soignante.
Or, elle n’est pas anodine pour l’enfant car elle pourrait être la cause d’effets négatifs à long-terme sur son bien-être physique et émotionnel. Elle peut induire une peur, voire une réelle phobie des soins et compliquer durablement son parcours de soins.
Lorsque les soins deviennent difficiles, la contention est le plus souvent vécue comme inévitable par les professionnels, bien que difficile et source de malaise : la réalisation du geste est privilégiée au détriment du respect des réactions de l’enfant.
La contention semble être le résultat d’un enchaînement délétère d’évènements, s’inscrivant dans un cercle vicieux : la détresse de l’enfant, qui peut provenir d’une forte inquiétude, de la colère d’être malade, de la peur d’avoir mal, d’un souvenir de soins difficiles, de l’absence de proches pour le soutenir… le conduit souvent à s’agiter pendant le soin. Cette agitation a souvent pour effet de renforcer la contention, elle-même source de détresse.
La contention peut aussi être vécue comme tellement stressante voire « violente » par des parents, qu’ils refusent d’être présents lors du geste, renforçant encore la détresse de l'enfant.
Prévenir et limiter la contention
Une prise en charge insuffisante de la douleur et de l’état émotionnel de l’enfant engendrent sa détresse et son agitation. Les contraintes organisationnelles et la nécessité de réaliser le geste conduisent à la contention. Les alternatives interviennent donc à plusieurs niveaux.
Les incontournables
L'analgésie
Il est avant tout important que tout soit mis en œuvre systématiquement pour éviter ou limiter la douleur provoquée par les soins.
Les moyens les plus courants sont :
- L’administration d’antalgiques,
- La crème anesthésiante,
- Le MEOPA.
> Voir aussi : Douleur de l’enfant l’essentiel (Pediadol)
Un guide de poche Pediadol qui permet aux soignants de trouver rapidement des propositions de traitement notamment concernant la douleur liée aux soins.
L’installation
L’installation de l’enfant est essentielle au bon déroulement du soin.
Pour l’optimiser, il convient d’anticiper la place de chacun : enfant, parent, soignant.
- De manière générale, évitez d’allonger l’enfant. En effet, lorsqu’il est allongé, l’enfant n’est pas libre de regarder ce qui se déroule autour de lui, il a le sentiment de perdre le contrôle de la situation. Préférez une position semi-assise.
- Amenez l’enfant à prendre la bonne position en lui proposant une distraction attrayante. Par exemple, proposez-lui un écran avec un dessin animé dans un angle de vue qui l’oblige à tourner la tête s’il s’agit d’un examen d’oreille. Ou encore, demandez-lui de faire sur une poupée ce que vous lui faites, en installant celle-ci dans la bonne position.
> Voir aussi : Comment s'installer lors d'un soin : 21 fiches avec photos
21 fiches avec photos pour aider les professionnels à trouver une position confortable pour chacun selon le soin et l'âge de l'enfant.
En amont du soin
Les principales alternatives à la contention se mettent en place en amont de la phase d’agitation de l’enfant, pour prévenir sa détresse.
La prise de contact
Le temps de la prise de contact est primordial.
- Laissez l’enfant s’acclimater à un environnement et des personnes inconnus en le laissant un temps dans les bras de ses parents ou à distance du soignant.
Profitez-en pour demander aux parents ce qui attirera le mieux l’attention de leur enfant.
- Allez à la rencontre de l’enfant en rejoignant son univers, en l’approchant avec un jouet ou un objet attrayant.
- Ce n’est qu’une fois le climat de confiance installé que les explications concernant le soin pourront être données ou rappelées en fonction du souhait ou non de l’enfant, du caractère programmé ou non du geste.
L’information, la préparation de l’enfant et de ses parents
Pour maitriser au mieux la situation, l’enfant doit savoir ce qu’on va lui faire, qui va s’occuper de lui, combien de temps cela va durer, ce qui risque d’être difficile, douloureux, inconfortable et surtout les solutions proposées pour éviter ou limiter ces difficultés… A défaut, il risque de se sentir trahi et abandonné au moment du soin, si ce dernier s’avère plus difficile que prévu pour lui.
De nombreux moyens d’information existent : films, vidéos, rubriques internet, photos, posters, documents écrits illustrés, poupées ou marionnettes pour montrer les soins et donner l’opportunité à l’enfant de jouer à le faire lui-même, se familiariser avec le matériel médical…
> Voir aussi : Les fiches SPARADRAP
(également déclinées sous forme de posters)
des supports pour expliquer aux enfants certains soins ou examens.
Pendant le soin
Obtenir l’immobilité
Lorsqu’un geste nécessite l’immobilité d’une partie du corps de l’enfant, il est conseillé de favoriser le mouvement de la partie du corps opposée à celle qui ne doit pas bouger.
Exemples :
- Faire agiter un hochet par le bras qui ne doit pas rester immobile
- Faire taper dans les mains pendant qu’on soigne la jambe, qu’on fait un vaccin sur la cuisse…
De plus, donner quelque chose à faire à l’enfant permet de détourner son attention du soin et l’aide à faire abstraction du geste. Par exemple, pour un enfant à partir de 5 ans, vous pouvez lui proposer un jeu des 7 erreurs et lui lancer un défi : « Je te parie que j’aurai fini le soin avant que tu n’aies trouvé les 7 erreurs ! ».
Détourner l’attention
La distraction agit en saturant la sensorialité de l’enfant. Il s’agit de solliciter différents sens (vue, ouïe, toucher, goût, odorat) pour concurrencer la sensation désagréable ou douloureuse liée au soin.
De plus, l’utilisation d'objets ludiques, de chansons, de marionnettes, de bulles de savon, de caresses ou de comptines permet d’installer une atmosphère détendue et d’obtenir la confiance de l’enfant. Lorsqu'il est sollicité selon ses compétences propres, l'enfant devient acteur là où initialement il subissait les événements.
À partir de 3 ou 4 ans, il est également possible d’utiliser son imaginaire pour l’aider à se dissocier de la réalité du soin, grâce à l’hypnoanalgésie.
Faire des pauses
Pour les soins pédiatriques longs, dont la durée peut être source d’agitation pour l’enfant, il est utile de réaliser de courtes pauses tout au long du geste.
De même, si l’enfant s’agite, la première étape est de stopper le soin pour lui laisser quelques instants de récupération. Renseignez-vous auprès de lui ou de ses parents pour connaître ce qui a pu déclencher sa détresse :
- Parfois une simple explication ou un court délai suffisent pour pouvoir reprendre le soin dans le calme ;
- D’autre fois, la douleur a été mal évaluée et un réajustement antalgique permet de poursuivre.
Suspendre le soin, indique aussi à l’enfant que vous tenez compte de sa parole, cela a pour effet de renforcer sa confiance.
Conclusion
Si malgré toutes ces mesures simples l’enfant ne se calme pas, et lorsque son état médical le permet, il est recommandé de reporter le soin à un autre jour.
Ce report est particulièrement indiqué dans les situations de pathologies chroniques qui nécessitent une prise en charge longue ou face à un enfant très anxieux qui pourrait développer une phobie des soins.
Voici les signaux d’alerte qui doivent vous encourager à arrêter le geste :
- L’agitation désordonnée de l’enfant, qui empêche toute approche ;
- La nécessité de tenir plusieurs parties du corps de l’enfant ;
- Le fait de faire appel à des collègues pour immobiliser l’enfant.
Auteurs
- Bénédicte Lombart, Cadre de santé Assistance Publique des Hôpitaux de Paris, Hôpital St Antoine, Docteur en philosophie pratique et éthique hospitalière
- Caroline Ballée, chargée de communication numérique, SPARADRAP
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Dossier créé en avril 2016