Ce qui est difficile ou gêne l’enfant
- Le fait de maintenir le masque sur son visage entrave sa liberté de mouvement, il se sent moins libre de bouger sa tête et par extension tout son corps.
- Il peut imaginer ou avoir momentanément le sentiment de ne plus pouvoir respirer, voire d’étouffer…
- Il est surpris par l’objet, le contact, le froid...
- Il pense qu’il ne peut plus parler, le son de sa voix est modifié.
- Il peut avoir le souvenir d’une précédente expérience difficile : contention, douleur.
- L’odeur du produit anesthésiant qui sent mauvais et qu'il retrouvera dans la bouche au réveil. Un enfant évoquait "de l’œuf pourri mélangé à des fraises" pour l’odeur du sévoflurane, un anesthésique par inhalation. Le MEOPA, lui, est inodore.
Certains enfants refusent la contrainte physique, ou gardent un sentiment de trahison :
- “J’ai dit que je ne voulais pas le masque, l’anesthésiste m’a dit que ça sentait bon la montagne.”
- “Je n’ai pas aimé l’odeur, je me suis débattu, on m’a tenu.”
- “Ce que j’aime pas, c’est qu’on essaie de l’enlever, et le docteur le remet.”
Ce que vous pouvez faire
L’idée principale est d’accessoiriser, de « pédiatriser » le masque pour le rendre plus attrayant et/ou de proposer une histoire un scénario pour distraire l‘enfant.
Le masque sifflet
Il s’agit d’adapter un sifflet sur le matériel d’anesthésie, sur la partie expiratoire.
Cette technique ne fonctionne pas sur les systèmes en circuit fermé.
L’utilisation d’un sifflet est utile à différents titres :
- l’enfant est distrait, il joue un rôle actif qui l’aide à maitriser plus facilement sa respiration,
- la plupart des enfants ont une conscience très imparfaite de leur respiration. Il est plus facile de dire à un enfant «fais du bruit avec le sifflet» que de lui demander d’inspirer. Le sifflet permet de «concrétiser» le souffle expiratoire, l'inspiration est ensuite automatique et favorise donc l’inhalation,
- grâce au son du sifflet les professionnels de santé sont assurés que l’enfant inhale bien le temps requis, ce qui est particulièrement utile pour l’inhalation du MEOPA (3mn minimum).
> En savoir plus sur le sifflet
Le masque parfumé
Il existe différents fournisseurs de masques parfumés (Laboratoires Intersurgical, Ambu…), mais il peut être plus économique de les parfumer soi-même avec divers produits : arômes alimentaires artificiels en flacons, parfums sous forme de sprays, de stylos ou feutres parfumés (Stabilo Trio frutti), ou de sticks à bille. Dans tous les cas on sera vigilant à ne pas parfumer les parties du masque en contact avec la peau et les yeux pour éviter tout risque d’irritation.
L’intérêt tient également dans la possibilité de faire choisir le parfum à l’enfant, si on peut réellement offrir un éventail de différents parfums.
Ce choix qui peut paraître anodin aux adultes, est un réel moyen de favoriser la participation et la coopération de l’enfant ou de limiter son sentiment d’impuissance.
Le masque tétine ou sucette
Pour le jeune enfant il est possible de choisir un masque un peu plus grand qui permet de contenir la tétine ou la sucette habituelle de l’enfant (au prix d’un “espace mort” un peu augmenté).
Comment accompagner l’enfant
Avant le geste
En pré-anesthésie, il s'agira d'informer l'enfant, de le familiariser avec le matériel en lui permettant d'essayer le masque, de jouer avec le sifflet, choisir le parfum… En fonction du jouet choisi, on pourra imaginer des scénarios de jeu qui seront l'occasion d'un échange rassurant entre le soignant et l'enfant.
Voici quelques suggestions :
- L’anesthésie au masque se prête particulièrement bien aux scénarios de type vol spatial, décollage d’un avion. L’odeur de l’anesthésique évoque le carburant de la fusée… un anesthésiste nous a rapporté proposer à l’enfant de porter un casque d’aviateur…
- Le sifflet peut évoquer la sirène de l'ambulance…
- On laissera l’enfant le manipuler, on l’encouragera à le mettre lui-même sur son visage, à jouer à endormir sa peluche.
- On peut lui faire remarquer le petit truc jaune qui sort de la valve de Ruben (“la petite souris”), le petit pneu que l’on peut gonfler pour que ça soit plus doux.
- On peut parler dans le masque pour faire entendre “la grosse voix”.
- On peut regarder l'enfant par le trou du masque, passer le doigt.
- On peut jouer avec le masque : imaginer que deux masques font une paire de chaussures, un masque fait une petite maison avec une cheminée…
- On lui précisera que le MEOPA n’as pas d’odeur (surtout si l’enfant a déjà eu une anesthésie au masque).
- Si l’enfant appréhende l’odeur, on lui conseillera de respirer par la bouche pour ne pas la sentir.
- Éventuellement on donnera un masque à l’enfant pour lui permettre de continuer à se familiariser avec l’objet de retour à la maison et avant l’intervention. Au bloc opératoire l'enfant retrouvera l'objet avec lequel il s'est familiarisé. Il bénéficiera ainsi d'un repère de sécurité.
On dit souvent à l’enfant qu’il doit “souffler dans le masque” alors que c’est l’inspiration qui est importante pour l’inhalation du mélange anesthésique ou du MEOPA. L’enfant très désireux de coopérer peut se mettre à souffler très fort et de façon trop saccadée, ce qui favorisera une apnée au début de l’induction. L’idéal est d’obtenir une respiration calme et régulière, condition d’une inhalation de bonne qualité. Il est donc préférable d’utiliser le message “respire tranquillement” dans le masque. Au besoin donner l’exemple avec sa propre respiration.
Chanter pour l’enfant ou avec l’enfant, qui chante dans le masque (cela fait une grosse voix).
Pendant l’induction, faire tenir le masque chaque fois que l’enfant le désire et peut le faire. Si l’enfant bouge, préférer la "contention souple" qui consiste à suivre les mouvements de la tête tout en maintenant le masque en place, ne jamais plaquer de force le masque sur le visage de l’enfant en l’immobilisant, si l’enfant refuse le MEOPA, privilégier une autre méthode antalgique. Il faut surtout éviter une inhalation forcée avec violence physique.
Une solution à tester
Un enfant de deux ans refuse énergiquement la pose du masque. Le médecin a avec lui des masques (usagés), qu'il lui présente. Il les jette à terre... et en même temps accepte le masque appliqué sur sa face. L’induction se passe sans encombre, avec tous ces masques jetés, ramassés, jetés de nouveau jusqu’à ce que le bras de l’enfant s’amollisse.
Après le geste
Pour un enfant, l’hospitalisation et l’opération sont toujours une expérience marquante, comportant du bon et du mauvais. Lui donner le masque (l’utilisation de masque à usage unique n’entraîne pas de surcoût) est une façon d’emporter chez lui ce qui représente le “bon” de l’hôpital. Beaucoup d'enfants le gardent comme la prunelle de leurs yeux (comme pour le certificat de bravoure) dorment avec…
Masque et sifflet, comment faire en pratique ?
Raccords
Des raccords sont nécessaires pour adapter le sifflet sur la sortie de valve expiratoire, plusieurs solutions sont possibles en fonction de la valve utilisée :
- Utiliser du matériel de récupération : des tétines de biberon (en coupant l’extrémité pour l’adapter au sifflet simple), des connecteurs en plastique cannelé fourni avec divers filtres-humidificateurs ou des raccords de caoutchouc blanc de respirateurs…
- Utiliser des raccords disponibles auprès de Intersurgical
Références :
1971000 Raccord droit 22M-30F
1704000 Raccord souple 22F-22mm ou non ISO.
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Les valves et circuits
Le raccordement sur les valves type Ambu ou Ruben ne pose pas de problème. La connexion se fait sur la sortie expiratoire de la valve (de couleur jaune sur la valve de Ruben).
Les éventuels inconvénients ou contraintes
Le fait d’ajouter un sifflet peut entrainer une légère résistance, mais qui est négligeable dans la pratique, et le sifflet ne sonne pas fort.
Auteur
Didier Cohen-Salmon, ancien anesthésiste pédiatrique, ancien président de SPARADRAP
Relecture par le Dr Véronique Lesage, anesthésiste pédiatrique
Mise à jour : septembre 2018